5 octobre – 15 décembre 2002

 

Paul-Armand Gette est un flâneur amoureux des choses de la nature plutôt entomologiste que rêveur. Ce ne sont pas les beaux paysages, les points de vue obligés qui l'intéressent mais les indices du désir qu'il observe dans la nature : cristallisation, fissures brûlantes, laves volcaniques, effusions, nuées ardentes, cratères. Le vocabulaire géologique est convoqué comme métaphore de la passion et de ses débordements. Sucs de plantes, giclures de fruits rouges, nymphéas, pétales de roses, la botanique à son tour multiplie les signes de l’éros. Depuis plus de 40 ans Paul-Armand Gette promène son regard à la lisière des catégories artistiques et scientifiques, empruntant tour à tour les méthodes et le vocabulaire du botaniste ou du géologue, utilisant aussi bien la photographie, la vidéographie, le dessin et le coloriage, mais aussi les prélèvements de roches, l'indexation, la prise de mesures, la collecte d'échantillons, l'écriture.

Il nous propose de l'accompagner dans ses promenades, “de l’autre coté du miroir” avec Alice (Lewis Carroll) où les mots signifient autre chose que ce qu'ils veulent dire : “j'aime le bord d’une plage, l’orée d'une forêt, le bord d’un lac, le bord d’une jupe ou d'une chaussette”, écrit-il. Alice, la petite fille des cristaux et des lettres, sera bientôt remplacée par les déesses de l'Olympe Diane, Vénus ou encore, les nymphes, les divinités de l’eau qui peuplent désormais son oeuvre et sont devenues ses modèles. Les nymphes et déesses mythologiques, qui depuis l'Antiquité inspirent les artistes sont aussi pour Paul- Armand Gette l'indication d’un glissement du désir vers les choses de l’art. La nymphe désigne les petites lèvres de la vuive féminine, cette fleur qui pousse à la surface de l'eau, mais aussi cet état intermédiaire et incertain entre la larve et l'imago. Le désir comme métaphore de l’art apparaît de manière fugitive, et souvent camouflée. Point d’exhibitionnisme fâcheux, rien de spectaculaire chez cet artiste qui pratique son art avec la distance, la retenue et l'ironie d’un moraliste du plaisir. Invité à Rochechouart, il nous promène à travers les différentes étapes de son travail des “calcinations à l’astroblème” tel est le titre de son exposition.

Rochechouart, Paul-Armand Gette connaissait déjà pour y avoir créé un totem de lettres au collège, en 1969. En chemin, il s'était arrêté à Limoges chez Raoul Hausmann avec qui il partageait une même défiance et un dégoût envers l'arbitraire du langage et tous les systèmes d'asservissement. En 1980, il organisait avec la dernière compagne d'Hausmann la première rétrospective de l'artiste à Malmô en Suède. L'exposition à Rochechouart sera donc ponctuée d'œuvres du Dadasophe, l'hommage d’un artiste à un autre artiste.

Le parcours proposé nous conduira donc des calcinations, reliefs et sculptures, au travail sur les cristaux, des plages de la mer du Nord aux photographies de Berlin, et de la mythologie et son cortège de nymphes et de déesses, à l’astroblème de Rochechouart. C'est aussi cette catastrophe de l’astroblème qui l’a guidé ici et ce sont les brèches qui lui serviront de matériaux.
Paul-Armand Gette est né à Lyon en 1927. Il a exposé dans de nombreux musées et institutions en France et à l'étranger. Il a réalisé plus de 200 publications récemment acquises par le FNAC et qui seront mises en dépôt au Centre du livre d'artiste à Saint-Yrieix-la-Perche.

  Vue d'exposition. Des calcinations à l'Astrobléme.Musée d'art contemporain de la Haute-Vienne, château de Rochechouart. Photo : Freddy Le Saux